Avec Jacques Chirac, la politique économique était inexistante, il a acté l’euro et fut à l’origine de quelques objets comme l’agence pour l’innovation industrielle qui n’ont pas fait long feux. Avec Nicolas Sarkozy, nous allions voir ce que nous allions voir. Résultat : des déficits considérables, une défiance des acteurs économiques et une dégradation de notre notation par les agences internationales. Bref, rien de très brillant. Nous pourrons juger le bilan de François Hollande à la fin de son quinquennat et bien malin celui qui peut dire si la réussite sera là. Mais d’ici là, reconnaissons les avancées et défendons le pacte de responsabilité qui accélère la seule voie sérieuse pour sortir de notre marasme.
Une majorité de français considère que le pays vient de perdre 18 mois. Comment pourrait-il en être autrement vu la situation économique et sociale catastrophique.
Pourtant, ces 18 derniers mois ont été utiles. Rappelons-nous cette fin du quinquennat Sarkozy rythmée par les sommets de la dernière chance d’une zone euro plombée par la faillite de la Grèce, par la glissade des pays de l’Europe du Sud et par le creusement d’une dette donnant les clés de notre pays à des investisseurs étrangers.
Depuis, nous sommes sortis de cette situation « funambulesque ». La zone euro n’est plus menacée d’éclatement, les taux d’intérêts sont bas, marquant la confiance des investisseurs, l’union bancaire européenne devrait empêcher une nouvelle catastrophe ou tout au moins en circonscrire les conséquences.
Nous pouvons compter désormais sur un cadre européen stabilisé qui permet de travailler à nouveau sur des questions politiques majeures : gouvernement de la zone euro, législation sociale, politique industrielle… Autant de sujets impossibles à aborder quand le bateau est dans la tempête et manque de couler.
Ce bilan des 18 mois du Président Hollande ne doit pas être oublié.
D’autres chantiers ont été menés et seront extrêmement utiles avec le retour de la croissance (la banque publique d’investissement, les accords entre partenaires sociaux sur l’emploi et la formation notamment) mais le rétablissement de ce cadre macro-économique était nécessaire. Nécessaire mais pas suffisant car si la tempête semble derrière nous, force est de constater que l’économie française n’a pas retrouvé sa dynamique. Même si son pronostic vital n’est plus engagé, elle reste encore dans un état comateux.
Et le Président a raison, depuis le début de son mandat, et en particulier hier soir, d’affirmer que nous sommes dans une crise de l’offre.
Derrière quelques profits de grands groupes, se cache la forêt des TPE, PME et ETI qui irriguent l’ensemble de nos territoires, qui portent l’innovation, et qui au final, sont les entreprises dont le potentiel de créations d’emplois est le plus fort. Sans elles, pas d’emploi.
Pour elles, la situation est très inquiétante, les taux de marges sont très faibles, les taux d’utilisation des capacités de production n’ont jamais retrouvé leur niveau d’avant la crise, le taux moyen d’autofinancement est autour de 75% alors qu’en sortie de crise, il n’est pas rare d’atteindre un taux supérieur à 100%. C’est donc bien une politique de soutien massif aux entreprises qu’il faut mener.
Pourrions-nous soutenir ces entreprises par une politique de la demande ? Cette question est légitime. Mais concrètement, que veut dire une politique de la demande ? Des revalorisations salariales (dans la fonction publique car quasi-impossible dans les entreprises vu la situation), des investissements publics plus importants et / ou des baisses massives d’impôts à la consommation et si possible une politique monétaire qui laisse filer la monnaie. Une sorte « d’abenomics » à la française.
Mais est ce qu’une telle politique répondrait aux besoins de l’économie française ? Nous n’avons malheureusement pas la puissance industrielle d’un Japon, l’organisation sociale et politique non plus. Une telle politique se traduirait par une aggravation des déficits publics, du déficit commercial et par un appauvrissement général soit par l’inflation, soit par la hausse des taux.
Et surtout, une telle politique ne permet pas les remises en cause nécessaires. Les cycles de vie sont de plus en plus court, les métiers changent, le numérique bouleverse l’ensemble de la chaîne de production et l’accès au marché, un nouveau produit ou service doit être pensé dès le départ pour attaquer l’international, l’énergie à faible coût n’existe plus… Notre économie toute entière à un saut qualitatif considérable à faire. Bien sur, d’autres modèles économiques plus locaux, moins profitables sont possibles et parfois souhaitables, mais ils ne sont pas suffisants pour dégager assez de valeur ajoutée pour financer notre système social.
Et c’est bien là l’enjeu pour un Président de gauche : avoir une économie fortement productive capable de financer un système de protection fortement solidaire.
C’est en cela que les propositions du Président de la République sont les bonnes.
Mener une politique de l’offre offensive avec une baisse des charges massives contre des engagements en matière d’emploi ; relancer l’approfondissement politique de l’Union Européenne ; s’attaquer à notre complexité administrative et à notre organisation territoriale pour rendre l’ensemble plus fluide et plus efficace, en particulier dans le domaine économique ; poursuivre notre politique d’innovation et de soutien à l’enseignement supérieur et à la recherche (le crédit d’impôt recherche fait l’envie de nos concurrents) sont les flèches de ce qu’on pourrait appeler, pour copier nos amis japonais, le « hollandomics ». Une doctrine dont le moteur est la négociation avec les partenaires sociaux.
La question de la régionalisation n’est pas la moins stratégique car si nous voulons renouveler notre tissu économique, il nous faut des capacités d’action plus forte au niveau local car les PME et les ETI qui vont tirer notre développement ne naissent pas toutes dans l’immédiate proximité du Ministère de l’économie.
Micaël